À la découverte du Raku
Je profite de cette jolie pièce dernièrement sortie du four pour vous parler de la méthode du Raku.
L'art du Raku ou l'élégance de la simplicité
Le Raku, né au Japon au 16ème siècle, est bien plus qu'une simple technique de cuisson.
C'est une véritable philosophie céramique, un art où le potier doit accepter de lâcher prise et d'accueillir l'imprévu.
Ceux qui me connaissent bien savent que c'est une pratique compliquée pour moi...
Voici les principales étapes pour obtenir des jolies pièces au Raku.
- La première cuisson (le biscuit) :
La pièce est d'abord cuite à 980°C.
Cette étape, appelée "cuisson du biscuit", permet à l'argile de se transformer en céramique, tout en restant poreuse pour mieux absorber l'émail par la suite.
À ce stade, la pièce est encore mate et sa couleur est celle de l'argile utilisée. - L'émaillage :
Une fois refroidi, le vase est émaillé avec des émaux spéciaux Raku.
Ces émaux sont formulés pour résister aux chocs thermiques extrêmes qui vont suivre.
Le choix et l'application des émaux sont cruciaux : ils détermineront en grande partie l'aspect final de la pièce.
On peut jouer sur les superpositions, les épaisseurs, mais aussi les réserves, ces zones qu'on laisse volontairement sans émail, pour obtenir différents effets.
L'émail va en quelques sortes protéger l'argile de la fumée.
Toutes les zones sans émail seront par conséquent exposées aux fumées et donc noircies. - La deuxième cuisson : le moment crucial
C'est ici que la magie opère.
La pièce de poterie est placée dans un four et rapidement chauffé à une température comprise entre 950°C et 1000°C.
Cette cuisson est beaucoup plus courte qu'une cuisson traditionnelle, elle dure généralement moins d'une heure.
On surveille attentivement la montée en température du four, les derniers degrés montent très très vite. - L'enfumage : l'intervention du feu et de la fumée
Lorsque les émaux sont en fusion, les pièces sont incandescentes et rapidement sorties du four à l'aide de longues pinces.
C'est un moment spectaculaire et potentiellement dangereux, qui demande calme et précision.
La pièce est immédiatement placée dans un conteneur rempli de matières combustibles.
J'utilise principalement de la sciure de bois, mais on peut également utiliser des feuilles, du papier journal, des prospectus...
Les effets seront différents selon le combustible utilisé : l'encre des pages de magazines peuvent donner des nuances irisées plus prononcées par exemple.
Le choc thermique provoque la fissuration de l'émail, créant un réseau de craquelures caractéristiques.
La combustion des matières organiques produit une fumée épaisse qui pénètre ces craquelures et les zones non émaillées, créant des effets de couleur uniques. - Un refroidissement brutal
Après quelques minutes d'enfumage, on peut plonger la pièce dans l'eau froide. Ce choc thermique "fige" les effets obtenus et arrête le processus de réduction. C'est un moment crucial où le potier découvre enfin le résultat de son travail. - Le nettoyage : pour révéler la beauté
Une fois refroidi, les pièces sont nettoyées pour révéler leur surface finale.
Les dépôts de carbone sont plus ou moins délicatement retirés, laissant apparaître les couleurs et les motifs uniques créés par le feu, la fumée et les émaux.
Le Raku : des pièces uniques nées du feu
Ce vide-poche boule est le parfait exemple des cuissons Raku.
Chaque craquelure, chaque nuance de couleur est unique.
Je n'arrive à obtenir des couleurs irisées et métalliques que de cette façon !
Pour moi, c'est la définition du wabi-sabi, la beauté de l'imperfection célébrée dans l'esthétique japonaise ; l'harmonie entre le contrôle et le lâcher-prise face aux caprices des éléments.
Que vous soyez potier chevronné ou simplement amateur de beaux objets, j'espère que cette plongée dans l'univers du Raku vous a captivé.
N'hésitez pas à me faire part de vos impressions ou de vos questions dans les commentaires !
